Des jets intenses et continus d’atomes froids sans refroidissement laser

Les gaz d’atomes à des températures de l’ordre du mK ou plus basses constituent un outil très utilisé pour la mesure de constantes fondamentales, le piégeage d’atomes et des expériences d’optique, d’interférométrie atomique et de physique moléculaire.

La plupart de ces “ atomes froids “ sont obtenus par refroidissement laser. Cette méthode ne fonctionne qu’avec certains éléments. Des scientifiques de l’University of Texas, Austin, USA, ont inventé une nouvelle méthode pour obtenir un faisceau intense d’atomes froids, ce qui pourrait fournir des flux de jets bien plus  élevés que ceux obtenus précédemment.  Ce qui serait intéressant pour compléter des études  qui ont été limitées par l’intensité du faisceau.

Le refroidissement laser est une technique permettant de refroidir un gaz atomique jusqu’à des températures de l’ordre du mK, voire du microKelvin.
La température d’un ensemble d’atomes correspond à l’agitation thermique de ceux-ci.
Un atome dans un faisceau laser de longueur d’onde convenablement choisie peut absorber de façon résonante des photons et en émettre par émission spontanée. Lors du choc avec un photon, un atome recule dans le sens inverse de l’onde incidente, puis il se désexcite par émission spontanée d’un ou plusieurs photons ce qui le fait donc à nouveau reculer dans une direction aléatoire. Cela diminue sa vitesse dans la direction concernée.
La grande densité de photons du faisceau laser permet en répétant l’effet ci-dessus un immen nombre de fois de diminuer la vitesse initiale thermique d’un atome de rubidium de quelques 300 m/s jusqu’à 10m/s. La température de l’atome étant proportionnelle au carré de sa vitesse moyenne, on observe dans ce cas un facteur de refroidissement de l‘ordre de 900.

La nouvelle  technique consiste à ensemencer en atomes, ici de Lithium, un jet cryogénique supersonique d’hélium gazeux qui est refroidi par détente adiabatique de 4,4 °K à environ 1mK.
L’ensemencement des atomes de 7Li est effectué après  l’ajutage  de sortie du jet.

Une lentille magnétique extrait du jet d’hélium les atomes de Li et les focalise en un très fort flux d’atomes. Cette méthode peut s’appliquer à nombre d’éléments paramagnétiques.

La figure 1 ci-dessous schématise cette technologie.

Fig.1. Schéma de l’appareillage expérimental Les atomes de Lithium, évaporés dans un four, sont ensemencés et thermalis&s dans un jet supersonique d’4He. Ce jet est créé en forçant l’4He à travers un ajutage dans un espace cryogénique refroidi. Une cryopompe à charbon actif évacue l’hélium tandis que le 7Li est extrait via un déflecteur. Le faisceau de 7Li extrait est focalisé par une lentille magnétique hexapolaire qui permet aussi par déviation de séparer le jet d’atomes de celui d’hélium. Le jet de 7Li est caractérisé par fluorescence et spectroscopie d’absorption. On pompe optiquement les atomes de lithium, ce qui les place tous dans le même état, ils ont donc la même énergie et répondent de la même façon au champ magnétique de la lentille qui les focalise tous au même point. Tiré de Intense continuous cold-atom source William Huntington , Jeremy Glick , Michael Borysow , and Daniel J. Heinzen * Department of Physics, The University of Texas, Austin, Texas 78712, USA. PHYSICAL REVIEW A 107, 013302 (2023). Avec autorisation.

Fig.1. Schéma de l’appareillage expérimental
Les atomes de Lithium, évaporés dans un four, sont ensemencés et thermalisés dans un jet supersonique d’4He. Ce jet est créé en forçant l’4He à travers un ajutage dans un espace cryogénique refroidi. Une cryopompe à charbon actif évacue l’hélium tandis que le 7Li est extrait via un déflecteur. Le faisceau de 7Li extrait est focalisé par une lentille magnétique hexapolaire qui permet aussi par déviation de séparer le jet d’atomes de celui d’hélium. Le jet de 7Li est caractérisé par fluorescence et spectroscopie d’absorption. On pompe optiquement les atomes de lithium, ce qui les place tous dans le même état, ils ont donc la même énergie et répondent de la même façon au champ magnétique de la lentille qui les focalise tous au même point. Tiré de Intense continuous cold-atom source William Huntington , Jeremy Glick , Michael Borysow , and Daniel J. Heinzen * Department of Physics, The University of Texas, Austin, Texas 78712, USA. PHYSICAL REVIEW A 107, 013302 (2023). Avec autorisation.

 

Le jet d’hélium arrive dans la région cryogénique à travers deux échangeurs de chaleur reliés respectivement au premier et au deuxième étage du réfrigérateur. Il arrive enfin dans l’ajutage à partir duquel il se détend dans le vide.

Le refroidissement adiabatique s’exerce  dans la région du flot continu après l’ajutage. Le jet de gaz atteint une température de l’ordre du mK

La Fig.2. présente une vue schématique de la région cryogénique. Les composants sont refroidis  à l’aide d’un réfrigérateur à tube pulsé

Fig.2. Schéma de la partie cryogénique du montage Un réfrigérateur à tube pulsé à 2 étages refroidit l’ajutage d’hélium et la pompe cryogénique. Cette pompe à absorption à charbon actif entoure le jet d’hélium. Certaines de ses ailettes, en cuivre recouvert de charbon actif, ne sont pas représentées sur la figure pour la visibilité. La figure transversale montre la section de toutes les ailettes. Tiré de Intense continuous cold-atom source William Huntington , Jeremy Glick , Michael Borysow , and Daniel J. Heinzen * Department of Physics, The University of Texas, Austin, Texas 78712, USA. PHYSICAL REVIEW A 107, 013302 (2023). Avec autorisation.

Fig.2. Schéma de la partie cryogénique du montage Un réfrigérateur à tube pulsé à 2 étages refroidit l’ajutage d’hélium et la pompe cryogénique. Cette pompe à absorption à charbon actif entoure le jet d’hélium. Certaines de ses ailettes, en cuivre recouvert de charbon actif, ne sont pas représentées sur la figure pour la visibilité. La figure transversale montre la section de toutes les ailettes. Tiré de Intense continuous cold-atom source William Huntington , Jeremy Glick , Michael Borysow , and Daniel J. Heinzen * Department of Physics, The University of Texas, Austin, Texas 78712, USA. PHYSICAL REVIEW A 107, 013302 (2023). Avec autorisation.

 

 

 

 

Cette technique est basée sur l’ensemencement d’un jet cryogénique continu d’hélium en sortie d’ajutage. Les atomes sont séparés du jet d’hélium grâce à une  lentille magnétique qui assure focalisation et déviation. On obtient un flux élevé d’atomes d’environ 2 x 1012 atomes/s qui est limité par les collisions avec les atomes d’hélium résiduels. On peut raisonnablement espérer qu’une amélioration du système de pompage donne un flux 10 fois plus élevé. Outre cette modification, on pourra optimiser l’ajutage, la source de 7Li, le déflecteur et la lentille magnétique.

La méthode peut s’appliquer, outre au 7Li, à d’autres atomes et molécules paramagnétiques. On pourrait ainsi produire des atomes d’hydrogène froids, ou des faisceaux d’hélium métastable. Il sera d’un grand intérêt de refroidir ainsi des éléments ou molécules extrêmement massifs. Par exemple, une molécule paramagnétique lourde comme YbF permettrait de rechercher une éventuelle  violation de la symétrie de retournement du temps.

Cette technique fournit des faisceaux intenses et de forte densité. Ils peuvent permettre de remplir des cavités et y pratiquer du refroidissement par évaporation ou encore faire de l’holographie atomique (ou les photons sont remplacés par des atomes. Cette source de faisceaux d’atomes peut aussi être utile à l’étude des collisions d’atomes froids et à des mesures de haute précision.

On envisage aussi d’injecter ce faisceau dans un anneau de stockage long de quelques mètres, où les atomes pourraient subir un refroidissement supplémentaire de sorte que le faisceau atteigne un nouveau régime de températures où le comportement quantique domine.

 

Pour en savoir plus :

Intense continuous cold-atom source
William Huntington, Jeremy Glick , Michael Borysow , and Daniel J. Heinzen *
Department of Physics, The University of Texas, Austin, Texas 78712, USA.
PHYSICAL REVIEW A 107, 013302 (2023)