La nano-rugosité de surface des ailes d’une cigale tue des bactéries
Les structures nanoscopiques de la surface des ailes de la cigale de Clanger (Psaltoda claripennis) ont la propriété de tuer par un effet purement mécanique des bactéries qu’on y a déposées . Des chercheurs australiens et espagnols ont étudié ce phénomène et démontré que ce mécanisme était entièrement dû à la structure de la surface. Ceci ouvre la voie à une approche radicalement nouvelle de la conception de surfaces antibactériennes.
Dans le règne végétal et animal, il existe de nombreuses surfaces ayant la propriété de rester propres malgré la présence de nombreux contaminants dans leur environnement. Parmi celles-ci, citons la feuille du lotus et la peau des requins. Mais ces surfaces doivent leur qualités autonettoyantes à leur nature super-hydrophobes, c’est-à-dire qu’elles ont une énergie de surface plus faible sèches que mouillées, les gouttes n’adhèrent plus à la surface et la quittent en emportant les impuretés.
Les ailes de cigales sont généralement très hydrophobes et donc autonettoyantes, mais bien qu’on ait pensé que cette caractéristique avait un lien avec leur propriétés bactéricides, l’étude de cette équipe internationale ( Universitat Rovira i Virgili, Tarragona, Espagne et Swinburne University of Technology, Hawthorn, Victoria, Australie) de chercheurs a montré qu’il n’en était rien. En utilisant la bactérie Pseudomonas aeruginosa qui adhère bien aux ailes de la cigale de Clanger, ils ont observé que les cellules de cette bactérie étaient très efficacement tuées par la surface des ailes.
La structure de surface des ailes de Psaltoda claripennis a été parfaitement déterminée au microscopie à force atomique(AFM) et au microscope électronique à balayage.
Les ailes sont couvertes par un réseau grossièrement hexagonal de piliers de taille nanoscopique ( 100nm de diamètre, 200nm de hauteur et un capuchon sphérique supérieur de 60 nm de diamètre). Les piliers sont espacés de 170 nm.
Lorsque les cellules de la bactérie Pseudomonas aeruginosa entrent en contact avec les ailes de cigale, elles sont déformées et se rompent mécaniquement au contact du relief nanoscopique de l’aile. La dimension caractéristique des piliers de la surface des ailes(~100 nm) est dix fois plus grande que l’épaisseur de la membrane de la bactérie. Les chercheurs ont donc modélisé la membrane comme une fine couche élastique en négligeant structure interne et composition. Et comme la taille d’une cellule de la bactérie est plusieurs fois plus grande que l’espacement entre piliers, ils en ont conclu que l’augmentation de surface due à l’adsorption sur les piliers conduisait à un allongement inhomogène qui entraînait la rupture de la membrane.
Un tel modèle suggère que ce mécanisme bactéricide est purement mécanique et non biologique. Ceci est confirmé par une expérience où une évaporation d’or sur les ailes ne change en rien le pouvoir bactéricide de la surface en dépit de la variation substantielle de la chimie de la surface. Les chercheurs ont pu montrer que les bactéries Gram positif dont la rigidité est plus grande que celle des bactéries Gram négatif avaient une plus grande résistance à cet effet.
La vidéo suivante est une simulation représentant le mode d’action d’une telle surface sur une bactérie.
[jwplayer mediaid= »14112″] Crédit Nature
Pour en savoir plus :
Biophysical Model of Bacterial Cell Interactions with Nanopatterned CicadaWing Surfaces
Sergey Pogodin, Jafar Hasan, Vladimir A. Baulin, Hayden K. Webb, Vi Khanh Truong,
The Hong Phong Nguyen, Veselin Boshkovikj, Christopher J. Fluke, Gregory S. Watson, Jolanta A. Watson,
Russell J. Crawford, and Elena P. Ivanova, Biophysical Journal Volume 104 February 2013 835–840,