Un accessoire de téléphone mobile qui teste la présence d’un virus en quelques minutes !

Des systèmes de diagnostic portables qui permettent de doser un marqueur biologique au chevet d’un patient seraient bien utiles pour tester une attaque virale quelle qu’elle soit. Des chercheurs de l’University of Cincinnati, Cincinatti, USA, ont mis au point un dispositif miniature qui peut effectuer sur un échantillon biologique une réaction immunologique et qui se connecte simplement à un téléphone portable.

Le diagnostic par immunologie, dit aussi immunodiagnostic, utilise une réaction-antigène-anticorps comme première phase de détection.
Un antigène est une macromolécule d’origine naturelle ou synthétique qui peut être reconnue (chimiquement) par des anticorps ou des cellules du système immunitaire d’un être vivant et déclencher une réponse immunitaire. Si cette reconnaissance se produit in vitro, la réaction chimique peut se traduire par un effet physique (chimiluminescence, photoluminescence, fluorescence, coloration ou autre) qu’il convient alors de détecter par une technique appropriée.
L’une des méthodes les plus répandues est celle nommée ELISA (de l’anglais Enzyme-Linked Immunosorbent Assay, soit dosage d’immunoabsorption par enzyme liée). Elle utilise deux anticorps. L’un de ceux-ci est spécifique de l’antigène, tandis que l’autre réagit au complexe antigène-anticorps et est couplé à une enzyme. Cet anticorps secondaire va causer un effet physique du genre indiqué plus haut. La méthode peut aussi détecter un anticorps, on doit alors munir le test d’un antigène spécifique de celui-ci.

 

La phase 1 de la détection : réaction biologique

Le fonctionnement du nouveau  laboratoire sur puce réalisé par les chercheurs est schématisé sur la Fig.1. La puce est fabriquée en copolymère d’oléfine cyclique COC, un polymère amorphe transparent produit industriellement. Deux réactifs lyophilisés correspondant à ceux nécessaires à la méthode ELISA pour détection du virus de la malaria sont placés dans deux réservoirs séparés.
Du sérum contenant l’échantillon à tester est introduit dans un premier compartiment, la chambre d’entrée.
Des microcanaux couplés à des surfaces hydrophiles le drainent vers les deux réactifs qui retrouvent ainsi leur forme liquide. L’enzyme, en bleu sur la figure, va réagir avec le sérum pour former un complexe antigène-anticorps. Celui-ci va enfin réagir dans la chambre de réaction avec le r&actif substrat reconstitué en liquide. Cette réaction, dans le cas du virus de la malaria produit directement une lumière, il s’agit d’une chimiluminescence.
Le test sur la puce est entièrement contrôlé par les propriétés des canaux, leur géométrie et la capillarité, sans aucun pompage extérieur.

Fig.1. Schéma du laboratoire sur puce microfluidique. Le fluide se déplace par capillarité. Dans ce système microfluidique sont incorporés deux réservoirs de réactifs lyophylisés. Au contact du sérum, les produits liquides seront reconstitués et la réaction ELISA aura lieu si le sérum contient l'antigène du virus que l'on recherche. Tiré de A new microchannel capillary flow assay (MCFA) platform with lyophilized chemiluminescence reagents for a smartphone-based POCT detecting malaria Sthitodhi Ghosh, Kashish Aggarwal, Vinitha T. U., Thinh Nguyen, Jungyoup Han and Chong H. Microsystems & Nanoengineering (2020) 6:5 https://doi.org/10.1038/s41378-019-0108-8 CCA 4.0

Fig.1. Schéma du laboratoire sur puce microfluidique.
Le fluide se déplace par capillarité.
Dans ce système microfluidique sont incorporés deux réservoirs de réactifs lyophilisés. Au contact du sérum, les produits liquides seront reconstitués et la réaction ELISA aura lieu si le sérum contient l’antigène du virus que l’on recherche. L’enzyme du réservoir en bleu est associée à un substrat, le DAB (3,3′-Diaminobenzidine ) nécessaire à la réaction.
Tiré de A new microchannel capillary flow assay (MCFA) platform with lyophilized chemiluminescence reagents for a smartphone-based POCT detecting malaria
Sthitodhi Ghosh, Kashish Aggarwal, Vinitha T. U., Thinh Nguyen, Jungyoup Han and Chong H. Ahn.
Microsystems & Nanoengineering (2020) 6:5 https://doi.org/10.1038/s41378-019-0108-8    CCA 4.0

 

L’observation du résultat de la réaction

Il ne reste plus alors qu’à observer optiquement le résultat de la réaction.
C’est le rôle d’un détecteur de haute sensibilité. Il est incorporé à un  boîtier contenant la puce microfluidique et scrute la chambre de réaction. Son électronique est alimentée par un téléphone portable auquel il est connecté par la prise USB. Le résultat, quand la réaction est terminée, est lisible sur le téléphone.
La Fig.2. ci-dessous détaille le système micro-fluidique et montre une photo du dispositif branché sur un téléphone portable.

Fig.2. Détails de la puce microfluidique et dispositif final A gauche - Détail des microcanaux de la puce microfluidique A droite - Photographie de l'appareil comprenant puce, détecteur et électronique monté sur un telephone portable. Tiré de A new microchannel capillary flow assay (MCFA) platform with lyophilized chemiluminescence reagents for a smartphone-based POCT detecting malaria Sthitodhi Ghosh, Kashish Aggarwal, Vinitha T. U., Thinh Nguyen, Jungyoup Han and Chong H. Microsystems & Nanoengineering (2020) 6:5 https://doi.org/10.1038/s41378-019-0108-8 CCA 4.0

Fig.2. Détails de la puce microfluidique et dispositif final
A gauche – Détail des microcanaux de la puce microfluidique
A droite – Photographie de l’appareil comprenant puce, détecteur et électronique monté sur un téléphone portable.
Tiré de A new microchannel capillary flow assay (MCFA) platform with lyophilized chemiluminescence reagents for a smartphone-based POCT detecting malaria Sthitodhi Ghosh, Kashish Aggarwal, Vinitha T. U., Thinh Nguyen, Jungyoup Han and Chong H. Ahn.
Microsystems & Nanoengineering (2020) 6:5 https://doi.org/10.1038/s41378-019-0108-8 CCA 4.0

Un logiciel dans le téléphone permet d’enregistrer les données  de les traiter et les présenter. On peut imaginer  que des versions ultérieures  du dispositif pourraient fournir un traitement spectroscopique du signal optique.
Ce dispositif a été testé avec succès sur le virus de la malaria. A partir du dépôt de l’échantillon et de sa circulation par capillarité, il s’écoule environ 1 minute avant le début de la chimiluminescence. Celle-ci reste saturée durant les 20  à 25 minutes suivantes.
Il est remarquable qu’une analyse sérologique, processus qui nécessite plusieurs opérations sur des liquides au laboratoire, ait pu être réduite au dépôt d’une goutte de sang sur une petite plaquette de plastique, suivi d’une lecture rapide. Le système, à l’état de prototype, sera probablement commercialisé dans l’avenir.

Pour en savoir plus :

A new microchannel capillary flow assay (MCFA) platform with lyophilized chemiluminescence reagents for a smartphone-based POCT detecting malaria Sthitodhi Ghosh, Kashish Aggarwal, Vinitha T. U., Thinh Nguyen, Jungyoup Han and Chong H. Ahn.
Microsystems & Nanoengineering (2020) 6:5