On a vu de l’eau couler sur Mars

Depuis longtemps, les astronomes  se sont posés la question de l’existence d’eau sur Mars. On savait déjà qu’il devait en exister sous forme de glace sur les calottes polaires de la planète rouge. Mais on n’avait jamais eu de preuves d’eau sous sa forme liquide.

Le satellite Mars Orbiter en révolution autour de Mars a fourni depuis cinq ans de nouvelles images de haute résolution. Elles   montrent des détails  qui pourraient constituer une preuve de l’existence d’une circulation actuelle d’eau salée durant la saison chaude  sur la planète.

On observe sur ces images des traînées  sombres d’une largeur de 0,5 à 5 mètres sur des pentes de 25° à 40° avec des longueurs allant jusqu’à plusieurs centaines de mètres. Elles apparaissent et croissent de la fin du printemps martien  au début de l’automne pour s’effacer durant la saison froide.

L’orbite de Mars est beaucoup plus elliptique que celle de la terre de sorte que, si Mars possède des saisons similaires à celles de la Terre, elles ont des intensités et des durées très inégales au cours de l’année. Remarquons que l’année martienne est presque deux fois plus longue (~ 687 jours ) que celle de la terre.
Dans l’hémisphère nord , les saisons sont moins marquées que dans l’hémisphère sud, car Mars est à son aphélie(point de l’orbite le plus éloigné du soleil) à la fin du printemps et à son périhélie (point le plus proche du soleil) à la fin de l’automne, d’où des hivers courts et doux et des étés longs et frais ; le printemps dure ainsi 52 jours de plus que l’automne.
À l’inverse, l’hémisphère sud connaît des saisons très marquées, avec des hivers longs et très froids tandis que les étés sont courts et plus chauds que ceux de l’hémisphère nord. C’est donc dans l’hémisphère sud qu’on observe les écarts de température les plus élevés.

L’hypothèse de l’eau salée

Alfred S. McEwen, professeur à l’Université d’Arizona à Tucson et ses collaborateurs  ont analysé ces images  et les ont interprétées. Pour eux,  il ne peut s’agir que d’un écoulement d’eau salée.
Ces traînées  variables apparaissent à des endroits où la température à la surface varie entre -23°C et 27°C dans l’hémisphère sud de Mars. De plus ces images dont l’aspect varie  avec les saisons ne surviennent qu’en des endroits où la température peut dépasser -23°C.
Par ailleurs ce phénomène n’a pas été observé dans l’hémisphère nord de Mars où les étés sont beaucoup plus froids.
L’hypothèse d’un écoulement d’eau pure a dû être rejetée, d’une part car la glace se sublimerait très vite dans ces régions chaudes, d’autre part car on observe ces traînées variables bien au dessous du point de congélation de l’eau pure.
La salinité de l’eau abaisse le point de congélation de celle-ci jusqu’à -200°C à la pression atmosphérique martienne de 6,10 mbar(610 Pa) et réduit le taux d’évaporation d’un facteur 10, ce qui lève ces objections.
L’hypothèse d’une explication par l’évaporation du CO2, présent dans l’atmosphère ténue de Mars, est rejetée en raison du fait que le CO2 ne peut geler dans ces régions chaudes.

Une suite d’images qui convainc

La série d’images suivantes montrent les évolutions observées durant la saison chaude en un point de l’hémisphère Sud de Mars :

La plupart des saumures qu’on peut trouver sur Mars ont des températures d’eutectique au dessous de -23°C à l’exception de la plupart de celles à base de sulfates.

Un eutectique est in mélange de deux corps purs particuliers. A la différence des mélanges les plus courants, sa température de fusion-solidification est constante. Cette température d’eutectique  est aussi la température la plus basse à laquelle il peut exister du liquide. L’eau et les sels forment de tels eutectiques.

Les compositions les plus probables pour les saumures des traînées observées sont celles à base d’eau bien sûr et de chlorures de manganèse, de sodium ou calcium, ou encore de sulfates de fer. Elles ont des températures d’eutectique allant de -68°C à -27°C.
Il reste un point inexpliqué, c’est la couleur noire des écoulements. Mais les chercheurs pensent que d’autres observations et des expériences de laboratoires permettront de le comprendre.
L’existence d’eau liquide sur Mars sera, si elle se confirme, d’un grand intérêt pour l’astrobiologie, science qui a pour but de rechercher la présence, l’origine et l’importance  de la vie dans l’univers.

En savoir plus

  • Science 5 August 2011: Vol. 333 no. 6043 pp. 740-743 DOI: 10.1126/science.1204816
  • Mars (Wikipedia)